7 octobre 2014
par Arnaud Lejeune
Les spécificités de l’école Kishinkai aïkido
Quelles sont les spécificités de l’école Kishinkaï et quels en sont les bienfaits?
On me pose souvent la question des spécificités de l’école Kishinkaï et de ses bienfaits. Voici quelques éléments de réponse que je peux apporter dans une liste qui n’est ni exhaustive, ni figée.
Deux principes au cœur de la pratique, Musubi et Awase:
Deux principes sont omniprésents dans le Kishinkaï Aïkido. Il s’agit d’Awase et Musubi. Si ces deux notions sont souvent revendiquées par les différentes écoles d’Aïkido, il peut y avoir des nuances dans leur interprétation.
Awase signifie s’harmoniser. Au Kishinkaï cela correspond au fait de s’adapter à la situation. Cela peut se traduire par une harmonisation extérieure, telle que le fait d’orienter son corps dans la même direction que le partenaire, mais pas exclusivement. En effet, une entrée très incisive (Irimi) où l’on prend un ascendant sur aïte (l’ « autre ») sera la plus efficace lorsqu’on aura été capable de la percevoir correctement. Notre mouvement pourra alors être direct sans heurter.
Musubi signifie lier, unifier. Au Kishinkaï cela correspond à la capacité à s’unir à aïte. Il s’agit du pendant invisible d’Awase. Cela se manifeste par exemple par la capacité à ne pas modifier un contact établi lors d’un mouvement, afin que la personne qui nous fait face ne se rende éventuellement compte de notre action que le plus tard possible, au moment où elle ne peut plus avoir de réaction efficace.
La vitesse constante:
La technique doit être exécutée à une vitesse constante, sans accélération ni à-coups. Cela permet comme le Musubi, de limiter la perception de nos actions par uke, et sa capacité à y réagir.
Cette vitesse constante peut être harmonisée à celle de l’attaque, ou au contraire être plus lente ou rapide selon la situation. Elle est souvent calée sur celle de l’attaque lorsqu’il s’agit d’une saisie.
Photo de Shizuka Tamaki
La disponibilité permanente:
Le Zanshin est une sorte d’éveil constant. Cet état permet de percevoir notre environnement et de s’y adapter de la façon la plus efficace possible.
Au niveau physique cela nécessite un corps détendu sans être mou, capable d’agir instantanément et en permanence.
Cette disponibilité mentale et physique ne se traduit pas par une attitude caricaturale de petit samouraï, mais par une attitude paisible et éveillée.
Photo de Shizuka Tamaki
Légèreté de la saisie:
On pense souvent à tort, qu’une saisie forte est une attaque efficace. Malheureusement lorsque nous faisons face à une personne avec un minimum d’expérience, c’est évidemment loin d’être le cas.
Plus la saisie est forte, plus le corps est crispé, moins on est capable de sentir ce que fait le partenaire et d’avoir une action sur lui. Sans compter qu’une saisie forte ne peut poser problème que lorsque l’on est physiquement plus puissant que la personne à qui l’ont fait face.
Par ailleurs une saisie forte provoquera une réaction de défense de la personne qui se sentira agressée. En Kishinkaï les saisies sont donc légères afin d’augmenter leur efficacité. Elles se font de la même manière lorsque l’on saisit une personne, un sabre ou un bâton. Cela permet d’être plus sensible, rapide, et par là-même plus efficace.
Absence de contraintes:
S’il est évidemment possible de maîtriser une personne par la contrainte, ce type de travail porte en lui-même les racines de ses difficultés. Une personne agressée s’oppose généralement vigoureusement à la contrainte que l’on essaye de lui faire subir, et est d’autant plus difficile à contrôler.
Le but du Kishinkaï Aïkido est de contrôler par la non-opposition, la douceur et le relâchement. L’attaque est absorbée, détournée ou retournée contre le partenaire sans violence ni contrainte.
Ueshiba Morihei
La lecture d’intention:
Considérant que notre adversaire est plus grand, fort et rapide que nous, il est indispensable de lire dans ses actions afin de pouvoir en tirer profit et ne pas les subir. C’est pourquoi le Kishinkaï met un accent très fort sur la perception, et en particulier sur la lecture d’intention.
Photo de Rudy Lamy
Légèreté du déplacement:
Un point qui interpelle beaucoup de pratiquants même expérimentés lorsqu’ils débutent la pratique du Kishinkaï Aïkido, est la liberté de mouvement de ses adeptes. Cette liberté est le résultat de l’accent mis sur la légèreté du contact au sol. Le corps doit être léger, avec la sensation de flotter. Libéré de ses ancrages il acquiert une disponibilité, une rapidité et une efficacité étonnantes.
Photo de Rudy Lamy
Relâchement:
Le relâchement est un principe de base dans la majorité des écoles d’Aïkido. Pour autant, il est très difficile à expliquer et plus encore, à mettre en pratique. En effet le stress de la vie quotidienne est souvent source de nervosité et de crispation. Cette tension peut par ailleurs être accrue lorsque nous sommes attaqués, même dans le cadre du Dojo.
Grâce à une approche progressive, le Kishinkaï permet à ses adeptes de se relâcher dans des conditions de plus en plus intenses. Cette détente physique et mentale se transpose naturellement à la vie quotidienne, et permet à ses adeptes de lutter efficacement contre le stress quotidien, comme contre une attaque physique.
« De toutes les capacités physiques, le relâchement est la plus importante. » – Léo Tamaki
Photo de Johann Vayriot
Pourquoi pratiquer le Kishinkai Aïkido?
Le Kishinkaï Aïkido permet d’unifier le corps et l’esprit. Source de bien-être, sa pratique permet de relâcher les tensions, d’aiguiser la concentration, et de développer souplesse, intuition et tonicité musculaire.
En acquérant efficacité et confiance en soi, le pratiquant apprend à vivre en harmonie avec son environnement et avec lui-même.
Le Kishinkaï Aïkido peut-être pratiqué à tout âge.
Il est possible d’adapter la pratique à la plupart des soucis de santé.
Merci pour ce article
Je vais être ici pour faire une traduction des landes de dépôt ?
Merci beaucoup Arnaud, pour ses éclaircissements sur la pratique, que j’ai pu sentir dans le travail proposé par Léo au stage du week end passé à St Léger.
Des modifications comportementales à apporter dans la pratique, surtout au niveau des saisies et du relâchement !
Un long travail a réalisé, mais qui vaut à mon humble avis très largement le détour.
Au plaisir de te revoir très prochainement.
Cordialement.
Marc.
ps: puis-je placer un lien sur mon site vers le tien ?
C’est avec grand plaisir Marc et merci pour l’organisation :)
Amitié,
Arnaud
C’est avec grand plaisir Marc et merci pour l’organisation :) Tu peux bien sur utiliser le liens de mon site sur le tiens ;)
Si la pratique t’intéresse je donne des stages également ;)
Au plaisir de te revoir,
Amitié,
Arnaud
Article très intéressant. Merci. Je pratique dans un petit club des alentours de Jemeppes-sur-meuse qui est lié au Tokushima Budo Council Europe. J’aimerai donné une autre impulsion à ma pratique en me focalisant à l’aïkijujutsu qui est aussi enseigné au sein de notre petit club. En dehors de cela, j’aimerai prendre une direction divergente de celle de l’aïkikaï devenant très rigide à d’autres voies de pratique et ramené à un cercle très fermé. Pourrai-je assisté à l’un de vos cours en observateur et, pourquoi pas, par la suite, me voir enseigner l’aïkido en parallèle que la pratique au sein de mon dojo ? J’ai une idée des arts martiaux qui se refuse à croire que la seule voie suivie auprès d’un maître est la seule vraie. C’est pourquoi, je pense que je pourrai trouvé une partie de mes réponses au sein de votre dojo. J’ai mis 20 ans à tergiverser avant de m’y mettre alors que l’aïkido m’a toujours attiré (comme une évidence, le japon, son histoire, sa culture et son patrimoine m’ayant toujours paru comme un endroit connu par moi) tel un aimant. Je m’étale dans mes mots mais, encore merci pour ce site super bien fait.
Bonjour,
Merci pour votre message ainsi qu’a l’interet que vous m’avez porté.
Vous pouvez venir quand vous voulez au dojo et venir essayer un cours. Il n’y a que vendredi 25 mars que je ne donne pas cours car nous assistons à une manifestation.
Je reste à votre entière disposition pour tous renseignements supplémentaire.
Bien à vous,
Arnaud Lejeune
Une question et une remarque:
Pourquoi le Noir et blanc ? Pourquoi le hakama blanc ?
Une saisie peut-être puissante sans être contractée (Idem pour un atémi). Et elle peut utiliser tous les principes évoqués ci-dessus. Mais lorsqu’elle est « légère », il devient impossible de savoir si le mouvement de Tori est juste ou pas. C’est même un des grands problèmes pour une majorité de pratiquants et d’enseignants. Et les concepts fumeux, les nouveaux styles ou les nouveaux petits maîtres ne changent rien à cette impasse où s’accumulent la grande majorité des pratiques. Pourtant à l’intérieur même de l’école historique, il y a quand même beaucoup de gens qui travaillent juste et, donc, plus ou moins efficacement.
Monsieur Gelin,
Malgré l’excès émotionnel dont votre message fait preuve, je vais tenter d’y répondre.
Pour l’hakama blanc, je vous invite à lire cet article de Léo Tamaki : http://www.leotamaki.com/article-mais-pourquoi-porte-t-il-un-hakama-blanc-112033066.html
Vous y verrez d’ailleurs une photo d’O sensei avec un hakama blanc (en photo noire et blanche).
Pour la question de la saisie, je pense que vous vous méprenez et vous confondez force, efficacité, contraction musculaire.
Ici, monsieur Lejeune expliquait en quoi forcer une saisie, présente des inconvénients. Le plus important notamment étant le fait de donner trop d’informations au partenaire. Si vous avez lu (et compris) Sun tzu, ou même Machiavel/Clausewitz/John Boyd, ou tout autre stratège, je pense que vous pouvez comprendre que le fait de donner l’avantage informationnel à l’ennemi, est une erreur stratégique mortelle (même si on peut tout aussi bien « feinter » la donne informative à notre avantage. Les anecdotes ne manquent pas, que ce soit chez les grecs ou les romains ou les chinois ou les japonais). Et dans l’aïkido par exemple, cela s’exprime dans la physis.
Enfin, je rebondis sur vos mots que je trouve à la fois très forts et très… vides.
Le fait d’affirmer qu’un concept est fumeux, ne justifie en rien qu’il soit vraiment fumeux. Encore faut il bien s’harmoniser sur le mot « fumeux » lui même. Pour pouvoir l’affirmer, il va falloir développer un peu plus, avec des arguments, car les pointeurs de doigts, ne sont souvent que… des pointeurs de doigts.
Vous parlez des nouveaux styles avec dédain, traduisant sans doute une colère. Le décorum actuel de l’aïkido, est très loin de la pensée/pratique de l’école Kishinkaï et je pense sans me tromper que c’est ce que monsieur Lejeune tentait d’expliquer dans cet article.
En espérant vous lire bientôt,
Thibaut
Bonjour,
Depuis quelques semaines, je viens de découvrir L’aïkido Kishinkaï et je suis ravi.
Cette pratique me convient car elle me semble orientée vers l’efficacité- adaptabilité à beaucoup de situations diverses- et la recherche d’armonie tant extérieure – par rapport à uke -qu’intérieure en dénouant mes tensions.
Je ne suis qu’un débutant mais je suis convaincu que cette forme d’aïkido m’apportera paix intérieure dans ma vie de chaque jour.
De plus, je suis trés heureux dans le groupe que je viens de découvrir.
Merci